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Philippe Desbrosses Philippe Desbrosses
Nadia Tarrieu Nadia Tarrieu
Jean-Yves Fromonot Jean-Yves Fromonot

La revanche des petits paysans traditionnels face aux gros agriculteurs industriels


Les petits paysans traditionnels font beaucoup mieux que l’agriculture industrielle pour nourrir le monde. Voyons comment nous pouvons nous inspirer de leur génie et de leur sagesse :

Nos amis Malgaches de Fianaraotsoa, communauté rurale guidée par des Jésuites agronomes développent depuis 40 ans une méthode de production de riz qui ne doit rien à la pétro-chimie, rien à l’industrie lourde, rien aux semences modernes, rien aux O.G.M. et pourtant ils battent tous les records mondiaux de rendements : jusqu’à 10 fois plus que les productions classiques, soit 240 qux/ha par an en une seule récolte… avec leurs petites mains, sans même un motoculteur…

Leurs performances reposent sur les défis que les hommes de tout temps, écologistes avant l’heure, ont été obligés d’affronter pour s’adapter à leur environnement avec souvent des découvertes empiriques et géniales comme celles que je vais vous conter :

Le système de riziculture de l’association Tefy Saina repose sur des principes vieux comme le monde.

1°) Assolements et rotation des parcelles, jamais deux années de suite la même culture au même endroit. Cette pratique que connaissent tous les paysans traditionnels du monde, mais néanmoins intelligents, permet de résoudre naturellement, 80% des problèmes de maladies, de parasitismes et de mauvaises herbes…


2°) Le choix de variétés « rustiques » c’est-à-dire des plantes que les paysans eux-mêmes pendant des années on sélectionné et adapté à leur situation : terroir, de climat, d’altitude…pour les rendre compatibles et productives de façon optimum.


3°) Une fertilisation organique, à base de compost, la vraie nourriture de la terre, qui renoue ainsi avec la vocation ancestrale de l’agriculture : le recyclage les déchets végétaux, animaux et humains.


4°) La découverte ou plutôt le génie de l’empirisme : on constate après 3.000 ans que le riz n’est pas une plante aquatique. En effet si on assèche la rizière au stade du « tallage », c’est-à-dire après quelques semaines de végétation, un grain fait alors 100 épis et même 200 épis…


5°) Autre astuce, découverte par hasard, le choix du repiquage : il faut que la plantule n’ait qu’une feuille, surtout pas deux ni trois, car à ce stade de développement on perd la moitié de la récolte.

La morale de cette histoire, c’est qu’il faut être paysan, en symbiose avec sa terre, et avec la nature, pour comprendre cette intelligence immanente qui nous entoure. Ce n’est pas dans des théories abstraites ou dans des laboratoires d’analyses que l’on peut spontanément découvrir de telles opportunités…


Toute aussi édifiante est l’histoire des « Suka Kollu » en Bolivie, rapportée par deux observateurs globbe-trotters, Maryvonne et Bruno Robineau. Les vestiges de Tiwanaku, la prestigieuse capitale d’un empire disparu au cœur de la Cordillière des Andes nous donnent une belle leçon d’humilité. Ce paysage lunaire de l’Altiplano Bolivien où des communautés d’Indiens, à 4.000 mètres d’altitude, essaient aujourd’hui de survivre des maigres récoltes de pommes de terre et des quelques lamas efflanqués qui broutent l’herbe rare de ces plateaux battus par les vents froids et brûlés par le soleil.


Les archéologues se sont longtemps demandés comment, il y a 600 ans, la ville de 120.000 habitants a pu se nourrir avec l’agriculture locale, alors qu’elle n’arrive pas à nourrir les 7.000 habitants actuels qui partent grossir le flot des chômeurs à La Paz ?

Comment ont-ils fait autrefois pour nourrir une civilisation prospère, pré-inca, dans cette pampa désolée, exposée à toutes les intempéries, où les cultures gèlent en plein été la nuit, quand elles ne sont pas détruites par la sécheresse le jour, ou inondées par les eaux saumâtres du lac Titicaca.


Pourtant, pendant des années, les O.N.G. et les Agences internationales n’ont pas manqué d’intervenir. Mais leurs ingénieurs agronomes, pleins de bonnes intentions, avec leurs engrais, leurs semences améliorées et leurs techniques sophistiquées ont toujours échoué et repartaient découragés par ce climat trop rude et ces terres trop pauvres… jusqu’à ce que Roberto Cruz, rencontre deux archéologues américains, accroupis dans son champs qui lui racontent en cette année 1987 d’étranges choses sur sa terre et sa fertilité passée.


Il apprend aussi que les curieuses élévations de terre qu’il a toujours connues et qui faisaient ressembler le paysage à une gigantesque tôle ondulée sont les restes d’un système de plate-formes séparées par des canaux et qu’il peut faire revivre pour cultiver des pommes de terre.

Malgré la réprobation de ses voisins superstitieux qui craignent que creuser la terre apporte le malheur au village, Roberto Cruz se laisse convaincre et ensemençe l’une de ses plate-formes remise en état.


Une nuit de février arrive ce qu’il craignait tant, une forte gelée. Au matin les paysans constatent que 90% de leur récolte est perdus. Quand Roberto descendit à son tour pour constater les dégâts, il est surpris de voir qu’un léger brouillard couvre son champ comme une couverture étalée à 90 cm du sol.


Sa surprise est encore plus grande quand il constate que les plants n’ont pratiquement pas soufferts de la gelée.

Quelques mois plus tard il engrange une récolte record. Même les voisins les plus récalcitrants sont convaincus. C’ést le premier Suka Kollu réhabilité, il y en a maintenant 128 ha dans 53 communautés.

Voilà ce qu’un savoir millénaire peu faire, là où une débauche de moyens et de technologies modernes ont été impuissants. Comment fonctionne les Suka Kollu :


Entre des plates- formes de terre surélevées s’intercalent des canaux d’environ 50 à 80 cm de profondeur où l’on amène l’eau d’une rivière voisine.


Pendant les journées très ensoleillées sur l’Altiplano, l’eau des canaux est réchauffée.

Lorsque celle-ci s’évapore, la rencontre avec l’air froid de la nuit provoque cette couverture brumeuse qui protège les plantes de la gelée. Ecologistes avant l’heure les Amérindiens savent mettre en valeur les atouts de la nature pour créer un micro-climat.

De plus l’eau douce des canaux permet d’arroser en période de sécheresse et elle empêche la remontée périodique des eaux saumâtres du lac. Algues et plantes s’y développent et attirent les insectes et les oiseaux aquatiques dont les résidus organiques issus du curage annuel permettent de fertiliser les cultures.


Voilà comment très simplement ces populations paysannes savent avec intelligence s’intégrer au fonctionnement de la nature et en utiliser les forces au lieu de les combattre avec beaucoup de désastres comme le fait notre arrogante société moderne.

Mieux qu’une explication sur l’agriculture biologique, l’histoire de ces paysans Boliviens ou Malgaches illustre ce que nous pouvons faire, à l’échelle humaine, avec des moyens modestes pour nourrir sainement équitablement et durablement les populations de la Terre.

Ces histoires sont légions dans tous les pays du monde qui ont préservé leurs traditions, là où le modèle technico-industriel n’a pas réussi à effacer de la mémoire des peuples la multitude de solutions naturelles et d’adaptations innées qui leurs assuraient souveraineté et indépendance.

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